Lecture - Bayonne, usage de ma ville
Sam 15 janvier 2011
J'ai littéralement dévoré ce livre, un soir, tard, ignorant les premiers signes de fatigue et de sommeil - je l'ai terminé dans la nuit, parce qu'il le fallait. Profitant d'un heureux bon d'achat à utiliser d'urgence, je l'avais mis dans mon panier au Virgin Megastore local. Le titre et la photo m'avaient interpellé. Puis je l'avais feuilleté, et en quelques lignes, j'étais conquis.
Txomin Laxalt est un Bayonnais d'adoption - il est Luzien. Journaliste, écrivain, il a écrit là une véritable déclaration d'amour à destination de la ville dans laquelle il fait si bon flâner. Car c'est le point d'ancrage du livre. La promenade. Celle qui part depuis chez lui, qui visite à pieds les rues pavées, le centre historique, les abords de la cathédrale. Celle par laquelle on découvre le curieux inalignement des fenêtres des bords de Nive, les places cachées à la vue du touriste, les ruelles en forme de traboules sur les remparts. Le Bayonne qu'il décrit, c'est celui de tous les Bayonnais. Plusieurs fois au cours de la lecture, je me suis écrié : "oui, c'est ça, c'est exactement ça".
Quand il évoque les flèches de la cathédrale, véritable pôle magnétique pour tout Bayonnais, quand il dit que même en voyage, ces flèches lui manquent, que lorsqu'il les aperçoit c'est le signe qu'il est de retour... oui, j'ai moi aussi vécu ce sentiment d'appartenance, compris en voyant cet horizon hérissé se découper dans le soleil couchant que j'étais chez moi ici.
J'ai vu ce qu'il voit, j'ai ressenti l'ambiance qu'il évoque, j'ai cherché les perspectives qui motivent son mouvement. Tourner à gauche ou à droite ? Par ici ? Non, plutôt par là, la vue est si belle...
C'est un livre d'ambiance ; comme une sorte de long plan séquence d'une marche au fil des rues, sans paroles, dans lequel on se prendrait à humer l'air frais des vieilles pierres.
Ce livre aborde aussi l'Histoire des rues et des quartiers. Sans tomber dans la nostalgie, parce qu'il nous parle du Bayonne d'aujourd'hui, celui qu'on peut voir en ouvrant simplement ses yeux, au matin, au midi, au soir. Certes, les pierres lui parlent, parce qu'il voit au travers l'ancienne cordonnerie remplacée par un magasin de fringues. Mais ces fantômes sont loin d'être fâcheux, ils ne sont qu'un constat ; tout change, mais à son rythme, dans la continuité.
La démarche de l'auteur est fluide. Il baguenaude, explore les venelles qu'il a cent fois arpenté. Il s'arrête. Parfois, une remarque, comme un doigt pointé sur ce qui était évident mais qu'on n'avait pas vu. Puis il repart.
Le livre fait la part belle au Grand et au Petit Bayonne. Un peu moins à la rive droite de l'Adour, et l'auteur le déplore - faute avouée à moitié pardonnée.
Peut-être que certains passages resteront abscons pour le non-initié. L'auteur a volontairement masqué certains noms de lieux et de personnes que nous, habitants de Bayonne connaissons bien. Mais je pense que ces énigmes ne gênent pas la lecture, au contraire ; elles attiseront la curiosité du lecteur, qui aura envie de refaire le parcours, pour aller vérifier de visu.
Reste une ode à Bayonne, sa ville, ma ville, notre ville ; un texte d'une grande poésie et richement écrit. Une oeuvre enamourée, que je conseille à tous les amateurs de musarde et de vagabondage éclairé, ceux qui aiment sentir les pavés sous leurs pieds et gardent les yeux disponibles à la surprise et à la singularité. Que je recommande à tous les Bayonnais de coeur ou en devenir.