Pourquoi j'aime Björk (et pourquoi je hais sa maison de disques)

Mer 01 septembre 2004

Björk est comme la lumière d'une étoile au fond d'une nuit noire. Elle est comme un éclat de diamant dans la poussière. Elle est comme un morceau de glace au fond d'un volcan.

Elle est tout ça à la fois. La Glace et le Feu ; typiquement Islandaise, mystérieuse, réservée, et en même temps explosive, énergique, débordante.

Peste

La petite fée a un fichu caractère. C'est sûr. Je me souviens d'une interview de Lars Von Trier après le tournage de Dancer in the dark. Il geignait littéralement en évoquant les caprices indicibles de la diva. Et le journaliste :

- But she's so talentuous!
[Lars] - I know! I know!

Je me rappelle de son explosion sur une journaliste Coréenne (je crois me souvenir) ; elle s'était jetée sur elle comme une chiffonière alors que la journaliste lui posait une question sur son enfant.

Un vrai combat de rue, avec les griffes et les dents, et tout.

Je vois aussi la pochette de l'album d'enfance de Björk, alors qu'elle avait onze ans, composé en grande partie par son père, sur lequel on trouve une très belle adaptation de Fool on the Hill, des Beatles, en Islandais. Et sur la pochette, je peux te dire qu'elle tire la tronche d'une sacrée peste.

Debut(s)

Je me souviens aussi de la première fois que sa voix de pic à glace s'est plantée dans mes tympans, en 1993, chez un pote de l'IUT.

L'album "Debut" m'a complètement renversé. "C'est qui ? - Björk. - Qui ? - Bjork !"

Post et Homogenic me semblaient trop expérimentaux à mon goût. Comment comprendre qu'elle puisse chanter "Jóga", aux cordes envoûtantes et commettre des chansons bruyantes, complexes, sans structure dans la face "B" des albums ?

C'est ça, aussi, Björk. Elle réussit toujours à mettre deux faces sur un album CD, une calme, une torturée.

Une fois de plus, sa dualité.

Perfection(s)

L'album qui suit est en fait la bande originale de Dancer in the Dark, Selmasongs. Rien à jeter, tout est exceptionnel. Pour la première fois depuis Debut, Björk tient son rang et garde son style de A à Z. Des trouvailles sonores édifiantes (elle mèle les sons d'une usine pour fabriquer le rythme de ses chansons), et sa voix ! sa voix !

L'album Vespertine est encore plus beau. Il est émouvant, aérien, achevé. Björk au sommet de son art. Promis, je te mens pas : j'en ai pleuré dans mon lit en l'écoutant pour la première fois.

Elle est tellement talentueuse, que moi qui ai beaucoup de mal avec le jazz suis tombé sous le charme de l'album Gling-Gló, du jazz quasiment entièrement chanté en Islandais ; piano, caisse claire, contrebasse. Et une fois de plus, sa voix.

Prrrrrrrrrt !

Medulla est sorti cette semaine en France. Dès que je l'ai vu chez mon disquaire, j'ai fait ni une ni deux (ni trois), et je me le suis payé.
"limited edition, SACD". Ouais, ouais, si tu le dis.

Je me dis : je le pose dans mon PC, je le rippe en OGG, je me le copie-colle dans mon iRiver, et je file sur la piste de la Nive en quads.

Et là, c'est le drame...

Rien. Quand on met le CD dans le lecteur, rien ne se passe. Absolument rien. Le CD ne vrombit pas, le répertoire est vide. Comme si on avait affaire à un disque vierge.

J'hésite un moment, je me dis que ça vient du lecteur. Je mets un autre CD audio : il le lit.

Je redémarre (réflexe pavlovien du windowsien). Pareil.

J'avise mon (vieux) Discman dont les batteries refusent de se charger, je le branche sur secteur (sans oublier de virer la poussière qui s'est amoncelée dessus) et là, il lit le CD.

Ben d'accord. Polydor, filiale de Universal Music, a trouvé le moyen de rendre mon lecteur de CD muet.

Bien obligé de faire quelque chose que je déteste par-dessus tout. Trouver sur le réseau P2P l'album de Björk, attendre qu'il se télécharge, pour ensuite le transformer en OGG.

Ce qui est totalement crétin, puisque j'ai acheté cet album, et que la copie sous forme de fichiers informatiques était uniquement pour mon usage personnel.

J'aurais voulu pouvoir écouter cet album sur son support original, avec la seule source potable audio dont je dispose : mon PC (ouais, j'ai un petit système 5.1 avec caisson de basse, ça casse pas les murs, mais c'est potable). Ca m'est impossible.

J'aurais voulu pouvoir écouter cet album n'importe où, dans mon lit ou sur la piste en train de kwader. Ca m'est impossible.

Il serait temps que les maisons de disques veuillent bien considérer ce qu'est le "fair use", c'est à dire l'utilisation privée et honnête d'un produit acquis légalement, au lieu de trouver des parades (qui apparemment tombent en quelques heures sans problème) qui ne font qu'augmenter la haine que peuvent avoir les consommateurs face à leurs magouilles fricardes.

OUI ! Malgré l'accès internet haut débit, je continue d'acheter des disques dans les magasins, et NON ! je n'aime pas télécharger des albums entiers. Ce coup-ci, c'est Universal qui m'y a obligé.

Fuckers.