Newbie GPL

Dim 07 août 2005

[via LugRadio/Forums]
La GPL est la General Public License. C'est elle qui détermine ce qu'on peut et ce qu'on ne peut pas faire avec un logiciel publié sous cette licence. Certains lui attribuent une caractéristique : sa viralité. En fait, elle se propage. Tout programme (code source) publié d'abord sous licence GPL ne peut pas changer de licence ; et tout dérivé du code source sous GPL doit obligatoirement être lui aussi sous publié sous cette même licence. Je ne dis pas que c'est une bonne ou une mauvaise chose, mais c'est un fait. L'objectif de Stallmann par cette licence est de propager à tous les programmes de la planète les quatre libertés qu'il a édicté il y a près de quinze ans.

Ken Fallon, encore lui, propose d'élargir cette viralité aux gens, dans une licence à laquelle tout libriste peut se reconnaître : "j'aide deux personnes à passer sous Linux qui à leur tour en feront de même".

Se propageant ainsi de manière exponentielle, les utilisateurs de Linux deviendront de plus en plus nombreux, atteignant des puissances de deux inimaginables. Il voit cette GPL du Débutant en 5 étapes :

Etape 0 : Trouver deux utilisateurs qui adhèrent à la Newbie GPL.

Etape 1 : Aider les utilisateurs à convertir leur PC à Linux, et qu'ils s'enregistrent (eux et leurs machines) au Linux Counter.
Cet enregistrement a pour avantage de faire la promotion de Linux, mais il donne surtout un certain sens de l'accomplissement et de l'appartenance à la communauté. Il est important que leurs PC soient sous Linux d'abord, le bronx des drivers et des noyaux peut attendre plus à plus tard.

Etape 2 : Enseigner Enseigner Enseigner Apprendre Apprendre Apprendre.
Cette étape ne consiste pas à tenir à bout de bras ou à invoquer RTFM tout le temps. Il s'agit de leur apprendre où ils ont plus le chance de trouver, et comment poser les bonnes questions. Au lieu qu'ils ne réinstallent sans arrêt leur PC principal, qu'ils fassent l'acquisition d'un PC d'occase pour jouer un peu avec.

Etape 3 : Ils passent la certification Junior Level Administration (LPIC-1) du Linux Professional Institute.

Etape 4 : Les utilisateurs passent à l'étape 0

J'ai plusieurs commentaires à faire là-dessus. Si le principe de base me plaît beaucoup, j'ai surtout vachement l'impression que c'est déjà le cas, même si personne ne l'a officiellement formalisé. Ca ne doit vraiment pas courir les rues, les gens qui sont passé à Linux tous seuls, à la force de leur poignet et la sueur de leur front.
Dans ce monde hautement communautaire du Libre, puisque tout le monde peut en être contributeur à sa façon, il me semblait que l'entraide existait de manière très efficace, par de nombreux moyens (listes de diffusion, forums, docs, sites dédiés, IRC, blogs, install party, LUGs...). Il ne me viendrait jamais à l'idée de poser quelqu'un devant un Manchot sans essayer d'assurer une assistance technique (dans la mesure de mes compétences), et au moins une paire d'adresses (mail ou web) vers qui se tourner en cas de pépin. Déjà, l'installation "tout seul comme un grand", j'ai testé pour vous, on rate la première à coup sûr, la seconde, si elle réussit, c'est un coup de chance...
Evidemment, le paradigme de base de Ken met carrément en équation ce qui se faisait déjà : un utilisateur de Linux, s'il a été correctement aidé par la communauté, en fera de même par un juste retour des choses.

C'est sur la suite que j'ai plus de réserves.

L'enregistrement au Linux Counter. Si j'ai moi-même succombé à cette petite tentation d'avoir moi aussi mon petit numéro dans la longue liste des utilisateurs de Linux, je me demande vraiment si ça a l'effet escompté par Ken. L'appartenance à la communauté me paraît plus sûrement éveillée par le partage de certaines valeurs, de certaines connaissances, et d'une forme de culture (qu'on peut appeler la "culture geek") qu'un simple numéro sur un compteur. Bref. Si ce n'est pas totalement inutile, ça reste peu utile, à mon goût.

L'étape 2 me paraît indispensable. Si le Newbie veut bien cesser d'être une sangsue auprès de son "maître Jedi", il va lui falloir faire des efforts. Il va falloir se documenter, chercher, bidouiller, se planter (c'est par l'erreur que tu progresses, petit scarabée - Maitre Foo), plonger dans les forums, poser des questions (si possible de manière intelligente)... bref : apprendre à pêcher plutôt que d'attendre qu'on te donne un poisson - à peu près Confucius.
Cela ne dispense pas le mentor de donner des coups de main en cas de gros soucis, d'aiguiller le Newbie vers les bons sites et les bons chanel IRC, bref : "ne pas tenir à bout de bras". Tout à fait d'accord.

La certification me laisse plus perplexe. Il ne m'est jamais venu à l'idée de demander à un copain libriste : "t'as eu tes diplômes / certifications ?". Ni même dans le monde du travail, que ce soit sous Windows ou pas, j'ai jamais pensé à vérifier que mon interlocuteur était qualifié pour le boulot. De toute façon, ça se vérifie relativement vite. Si les types sont compétents, ça se voit. S'ils ne le sont pas, ça se voit aussi. Les certifications, certains doivent adorer qu'on leur en foute plein la vue avec des zoulis diplômes avec des zoulis tampons et des zoulis logos. Ca rassure, c'est sûr.
Mais pour le Newbie dont on parle au-dessus, même si la certif' proposée me paraît plutôt inoffensive (Junior Administration, boarf), je me demande encore une fois ce qu'il peut en tirer, et ce que la communauté peut en tirer aussi.
Tout bien réfléchi, la communauté peut beaucoup en tirer : si plus d'utilisateurs étaient certifiés par des organismes référencés et réputés, ça apporterait plus de sérieux dans le monde du travail - ça rejoint la démarche à adopter quand on veut présenter Linux à des décideurs. Plus on y va avec professionalisme, plus ils vont adorer. Si on peut arborer l'insigne officiel du "Certifié Linux", c'est clair que ça en jettera un max.
Mais... Dédé Nooby ? Ca lui donne (en gros) une jolie médaille en chocolat, puisqu'il ne pourra que difficilement draguer en boîte / à la plage / au bistrot du coin (raye la mention inutile) avec son certif, que son PC marchera quand même, avec ou sans diplôme accroché au mur, et que c'est pas ça qui va lui donner plus de bande passante, en fait. Evidemment, il y a le facteur psychologique (cf. l'étape 1), mais encore une fois je me demande dans quelle mesure ce facteur va bien faire pencher la balance...

Pas de commentaire sur l'étape 4, autrement, je repars dans le commentaire récursif, et il se fait tard, alors...

Pour conclure (ouf), si le principe de base (et qui marche par paire, les geeks aiment bien les puissances de deux) me plaît, et que je n'ai pas manqué d'aider mon prochain comme moi-même (à suivre, bientôt, "Jésus était un disciple de RMS"), je ne me sens pas d'attaque pour :
a) obliger quelqu'un à suivre ce principe ; même si je serais plutôt déçu de voir qu'on n'aide pas alors qu'on a été aidé (et ce, dans TOUS LES DOMAINES...)
b) demander à quelqu'un de fournir des renseignements pour une base de données nominative sur laquelle n'importe quel dictateur pourrait tomber
c) demander à quelqu'un de passer une certification (même bas niveau), alors que son métier ne l'impose pas - et alors que moi-même je ne suis pas certain de pouvoir réussir.

A part ça, je suis dispo pour t'aider à basculer à Linux, quand tu veux.