Douze hommes en colère

Mar 13 novembre 2007

On projetait ce soir, au cinéma "Le Royal" de Biarritz le superbe film de Sidney Lumet Douze hommes en colère, avec Henry Fonda.
Je l'avais vu il y a plusieurs années de ça, par un heureux hasard, un soir d'été (en troisième partie de soirée, rassurons-nous, ce genre de film qui donne à réfléchir ne passera jamais en praïme-taïme).

Malheureusement, la copie n'était pas de très bonne qualité. En sus, elle était en 4:3.

Mais ça n'enleva rien à la puissance absolue de ce film, le véritable rouleau compresseur du combat entre les certitudes des uns et le doute des autres. Un juré, un seul, renverse les préjugés, les idées préconçues, les preuves mal ficelées, la défense désorganisée.
Avoir un coupable tout trouvé pour un meurtre, cela suffit-il pour l'envoyer à la chaise ?

S'il a été tourné en 1957, il reste d'une acuité toute moderne ; il pourrait très bien prendre place aujourd'hui, pour peu qu'il se situe dans un pays qui tolère encore la peine de mort. L'époque importe peu, c'est un huis clos qui ne concerne que les hommes et leurs histoires d'hommes ; en-dehors du temps qui passe et des gadgets de notre vie quotidienne. Tout se joue sur les rapports humains, dans une galerie de portraits qui portent toute l'humanité en eux : dans la roublardise comme dans la veulerie, dans la faiblesse d'esprit comme dans la sagesse, dans l'éructation comme dans la retenue.

Une scène, poignante m'a frappé ce soir. Parce qu'elle est d'une force dévastatrice - mais aussi parce que je l'avais oubliée : le "raciste" du jury, qui vocifère dans sa diatribe xénophobe, comparant l'étranger à des animaux, généralisant sur leurs mensonges, leur inclination "naturell" au meurtre. Et pendant ce temps, les autres jurés, même ceux qui croient à la culpabilité de l'accusé, se lèvent peu à peu et lui tournent le dos, le laissant pourrir dans sa haine, s'enterrer lui-même dans son galimatia primaire, pour finir seul face à lui-même, emmuré par le dos des autres. Il se taira, prenant conscience - on l'espère - de sa propre bêtise. Lui qui hurlait des arguments qui n'en étaient pas et qui ne pouvait convaincre personne d'autre que lui-même.

C'est beau.

A revoir une troisième fois.